dimanche 2 octobre 2016

Un limerick de Boris Johnson


Á première vue, comme ça, avec sa coiffure savamment désordonnée et ses manières brut de décoffrage, on peut le prendre pour un ruffian. L’impression est trompeuse. Il vient de la grande bourgeoisie et descend du roi George II. Il a fréquenté les meilleures écoles (l’école européenne de Bruxelles, le collège d’Eton et l’université d’Oxford) et parle couramment quatre langues.

Lui qui a été chargé de négocier la sortie du Royaume Uni de l’UE – sortie qui, je prends tous les paris – n’aura pas lieu selon les espérances des Britanniques qui ont voté pour le Brexit – a travaillé pendant seize ans pour la Commission européenne et a été député européen.

Ses gaffes longuement mûries sont le plus souvent répugnantes : « Si vous votez Tory, votre femme aura de plus gros seins et vous augmenterez vos chances d'avoir une BMW », « les djihadistes sont des branleurs qui pratiquent la masturbation intensive ».

Malgré la forte antipathie que suscite en moi ce sire qui joue au bouffon, j’avoue avoir ri avec admiration devant son dernier limerick. Inventé par les Britanniques, le limerick est un poème de cinq vers rimés selon le schéma aabba. Il est entendu que les deux premiers vers ont trois accents, et riment entre eux, que les deux suivants ont deux accents, riment entre eux et que le dernier a trois accents, et rime avec les deux premiers.

Le limerick est généralement salace. On dit qu'il y a trois sortes de limericks : ceux que l'on peut dire aux dames ; ceux que l'on peut répéter aux curés ; et les vrais. Un des plus célèbres, qui rappelle un peu l’histoire du Petit Chaperon rouge, est celui de la jeune dame du Niger (en gras les syllabes accentuées) :


There was a young lady from Niger,
Who smiled as she rode on a tiger;
They came back from the ride
With the lady inside,
And the smile on the face of the tiger.

Il y avait une jeune dame du Niger
Qui souriait en chevauchant un tigre
Lorsqu'ils revinrent de la promenade
La dame était à l'intérieur
Et le sourire aux lèvres du tigre.


En mai dernier, Boris Johnson (dont l’un des arrière-grands-pères était turc) remporte un concours de limericks, et les 1 000 livres qui vont avec, à l’initiative du Spectator (dont il fut autrefois le rédacteur en chef). Ce en solidarité avec l’humoriste allemand Jan Böhmermann, poursuivi en Allemagne, par Angela Merkel à la demande d'Erdogan. Böhmermann avait suggéré que l’autocrate turc avait des penchants pédophiles et zoophiles. Pour défendre l’humoriste allemand, Johnson avait déclaré : « Si quelqu'un veut faire une blague sur l'amour qui fleurit entre le président turc et une chèvre, il devrait pouvoir le faire, dans n'importe quel pays européen, y compris en Turquie. C'est formidable qu'un leader politique britannique montre que la Grande-Bretagne ne va pas s'agenouiller devant le présumé califat à Ankara ». Et il en avait rajouté une couche en disant que les chèvres turques étaient agréables à regarder et qu’il appréciait la Turquie puisque sa machine à laver était turque. Il se lança alors dans ce limerick apparemment improvisé où il évoque un jeune « branleur » (wankerer, rime riche avec Ankara) qui s'envoie en l'air avec une chèvre. Sans imaginer que, quelques mois plus tard seulement, il rencontrerait Erdogan en tant que ministre des Affaires étrangères.


There was a young fellow from Ankara
Who was a terrific wankerer
Till he sowed his wild oats
With the help of a goat
But he didn’t even stop to thankera.


Il y avait un jeune type d’Ankara
Qui était un formidable branleur
Jusqu’à ce qu’il s’envoie en l’air
Avec une chèvre
Mais il ne s'arrêta même pas pour la remercier.


Désolé que ma pauvre traduction affaiblisse cette petite merveille.

Un limerick de Boris Johnson

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