jeudi 7 novembre 2013

Le Thatchérisme : une réponse au déclin du Royaume-Uni ? (14)

Où en était la société britannique après un premier mandat de Margaret Thatcher ? Un pays de moins en moins rural : moins de 3% de la population active travaillant dans le secteur agricole et produisant à peine 3% du PNB national (aujourd’hui 1,6% de cultivateurs – dont les revenus baissent régulièrement – dans des exploitations en moyenne de 50 hectares, contribuent pour 0 ,9% du PNB). Le secteur tertiaire continua de se développer (57% de la population active), aux dépens de la population secondaire (40%). Le tertiaire était (et demeure) dominé par les services financiers, Londres étant le plus grand centre financier au monde, avec la plus forte concentration de sièges de banques étrangères. Le tourisme représente une part importante de l’économie britannique (le pays étant la sixième destination mondiale. Pendant ce temps, le secteur secondaire a continué de diminuer : production d’avions civils et militaires, de moteurs aérospatiaux. L’industrie chimique est devenue la seconde au monde, l’industrie pharmaceutique la sixième. Bien que n’étant quasiment pas subventionnée, l’industrie créative (art, cinéma, mode) n’a cessé de progresser (7% du PNB).




Le pays a eu la chance de devenir une puissance pétrolière relativement importante : il disposait dans les années 80 de 2% des réserves mondiales, représentant 5% du PNB. À titre de comparaison, les dépenses militaires accaparaient 6% de ce même PNB. On pourra dire du pétrole de la Mer du Nord qu’il a retardé les échéances, qu’il a permis aux Britanniques de rendre le déclin plus doux, une partie des profits tirés de la Mer du Nord ayant alimenté la politique sociale des gouvernements qui se sont succédés depuis 1979. Le Royaume-Uni est devenu autosuffisant en 1980 (80 millions de tonnes extraites), ce qui permit au pays d’avoir, pour la première fois depuis 40 ans, une balance commerciale excédentaire. Sans la Mer du Nord, Thatcher n'aurait pas eu les moyens politiques de faire face aux restructurations du début des années 80, c’est-à-dire à la destruction de deux millions d'emplois industriels qui les ont accompagnées. La production de pétrole atteignit un sommet, en 1985, (122 millions de tonnes produites et 8 milliards de livres de surplus pour la balance des paiements), le pays devenant le cinquième extracteur du monde. Il devenait par la même occasion le plus grand producteur de gaz en Europe. Un emploi écossais sur vingt était lié au pétrole  (100 000 emplois en 1990).


Londres est demeurée la première place financière mondiale. Le 23 octobre 1979, le gouvernement supprima le contrôle des changes et rétablit la convertibilité de la livre, ce qui permit aux résidents britanniques d’investir de nouveau librement dans le monde. La prospérité de la Cité de Londres ne s’est pas démentie, les rentrées invisibles ayant quadruplé. Mais le problème est que les activités de la place financière sont demeurées particulièrement tournées vers l’extérieur. Ainsi, sa contribution  au financement des industries britanniques n’était que de 15% contre 65% d’autofinancement. D’où l’avertissement de l’ancien Premier ministre Harold Wilson : « il va falloir choisir entre les Champs-Élysées et l’industrie britannique », d’autant que les somptueuses résidences de Park Lane, l’équivalent londonien des Champs ou de l’avenue Foch, étaient rachetées les unes après les autres par les potentats du Proche-Orient. Dans les années 80, les possesseurs de portefeuille investissaient davantage dans les caisses de retraite (rapport : 17,5% en moyenne sur cinq ans) que dans l’industrie, ces mêmes caisses réalisant 15% de leur investissement à l’étranger.

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